Samarcande… Rien que le nom me faisait rêver ! Après avoir lu des livres de voyage sur l’Asie Centrale, Samarcande apparaissait comme la cité féérique par excellence. J’y ai passé quelques jours et la magie opère !
«Fait curieux, je vais visiter une ville dont je ne sais rien que la magie de son nom.»
Ella Maillart, en 1932 à propos de Samarcande
Bon, depuis le passage de Ella Maillart, le ville a bien changé probablement et s’est modernisée. Mais elle fait toujours autant rêver les voyageurs du monde entier !
Trouver le bon endroit où rester
En attente de mon visa pour le Tadjikistan, je voulais trouver le bon endroit où loger à Samarcande. Après avoir pris un bus public depuis la gare pour rejoindre le centre-ville, je me rends à l’hostel Heartland. J’y fait rapidement la connaissance d’une porteña (habitante de Buenos Aires). On sympathise bien et on va dîner ensemble. Elle propose d’acheter une bouteille de vin ouzbek ensuite pour goûter. On se met en quête d’un endroit où acheter de l’alcool. On finit par trouver la caverne d’Ali Baba avec des bouteilles absolument partout.
Verdict : le vin rouge ouzbek est pas trop mal ! Et je re-confirme que les porteñas sont les femmes les plus parfaites au monde : son prochain voyage est le Pakistan où elle va louer une moto, elle jouait du piano à l’auberge avec son verre de vin posé à côté… J’étais pas loin de faire une demande au mariage !
On a changé d’auberge le lendemain. Il n’y avait pas d’espace extérieur, la clim était à fond sans arrêt et il n’y avait que des chinois ou japonais qui ne parlaient pas. Pas top comme ambiance ! On a bougé à Old Radio Hostel, et bonne pioche ! Une auberge simple avec quelques chambres autour d’une cour intérieur où deux tortues se baladent. La famille qui tient l’auberge est très gentille et le petit-déj servi est délicieux !
Le Bazaar Siab
Il y a plus d’options pour manger en plus autour de cette auberge. Notamment le bazaar Siab, où on est allé déjeuner le premier midi. Un repas basique mais efficace : le plov. Il s’agit du plat national ouzbek, et même de toute l’Asie Centrale. Du riz, des carottes, des pois chiche, oignons, mouton ou bœuf, et beaucoup d’huile.
On trouve beaucoup de nourriture au bazaar Siab : fruits, légumes, produits laitiers… C’est animé avec beaucoup de locaux venant faire leurs courses.
Enfin, quand je dis animé, pas pour tout le monde… Ce vendeur qui dort sur ses sacs d’oignons n’a pas dû faire un bon chiffre ce jour-là !
Le Mausolée Gour Emir
Le premier lieu ultra connu que j’ai visité à Samarcande est le mausolée Gour Emir, là où repose Tamerlan et sa descendance. Je vous avais parlé un peu de ce petit bonhomme dans l’article sur Tachkent.
Il souhaitait quelque chose de simple pour être enterré. Bah c’est raté ! Mais pour un Homme de cet importance, il fallait bien un édifice colossal, visible de loin !
J’y suis allé en fin d’après-midi, quand le soleil descend et illumine le mausolée.
Au 15ème siècle, Tamerlan régnait sur un véritable Empire : l’Asie Centrale, la Turquie, la Perse, le nord de l’Inde, le Caucase, le sud de la Russie, une partie de la péninsule arabique… Bref, c’était immense ! Et Samarcande était sa capitale, ni plus ni moins.
L’intérieur du mausolée est magnifique.
Si Samarcande est si connue et si belle, c’est grâce à Tamerlan et aux trésors qu’il a amassé durant ces campagnes guerrières. Bien que réputé pour sa cruauté, il avait un goût prononcé pour l’art et le raffinement. Car oui, il a massacré des villes entières, remplissant les places publiques de têtes coupées (si si c’est vrai). Les historiens estiment que ses campagnes militaires ont tué 5 % de la population mondiale de l’époque. Quand il était fâché le p’tit Timour, fallait mieux partir vite en courant…(Tamerlan signifie Timour le boiteux, tu m’étonnes qu’il était vite chiffon avec un surnom pareil).
Retourner au mausolée de nuit est une bonne idée, encore plus beau avec les lumières.
Derrière les murs
En me baladant vers ces sites historiques, j’ai remarqué que les rues et avenues qui y mènent sont souvent bordées par des murs ne laissant pas voir ce qu’il y a derrière. Après avoir cherché sur internet, je ne suis pas le seul à m’en étonner. C’est comme si la municipalité avait voulu cacher les petits quartiers moins tape-à-l’œil que les énormes édifices historiques. On peut tout de même parvenir à y entrer bien sûr mais il faut trouver la petite porte ou la petite ruelle. C’est le cas pour accéder à mon auberge également. On a l’impression d’y être arrivé car on est devant une porte, mais en fait celle-ci débouche sur une ruelle donnant accès au quartier et l’auberge se trouve 20 mètres plus loin.
Un peu vexant pour les habitants je pense ! Ou bien ils sont contents car ainsi ils sont tranquilles et pas emmerdés par les touristes curieux comme moi !
En tout cas, c’est étrange ces longs murs. Les autorités ont dû demander conseil à une entreprise israélienne pour construire ça, les spécialistes en la matière pour transformer des villes et villages en prison à ciel ouvert.
Le Registan de nuit
Lors du retour vers l’auberge après la visite du mausolée, on s’est arrêté au Registan, la place emblématique de Samarcande. Je ne le savais mais un spectacle son et lumière a lieu de 21h à 22h. Il y a pas mal de monde mais c’est impressionnant et l’occasion de faire des belles photos de cette place somptueuse.
On est resté tout le long du spectacle, à contempler ces trois madrassas s’illuminer de différentes couleurs au rythme de la musique.
Une fois le show terminé et le public parti, elles reprennent leurs couleurs habituelles, simplement éclairées par des projecteurs neutres. Ce spectacle est vraiment à voir, j’y suis même retourné un deuxième soir durant mon séjour à Samarcande.
Visite du Registan
Le Registan se visite aussi de jour évidemment. Mais seul cette fois car Tatiana est partie vers Boukhara poursuivre son voyage.
Registan signifie « Place sablonneuse » en persan, mais le bitume a remplacé le sable évidemment aujourd’hui. Elle était le cœur de la ville auparavant. J’ai lu beaucoup de livres avant ce voyage sur l’Asie Centrale et la Route de la Soie. J’imaginais les scènes de l’époque, debout au milieu de cette place, avec les longues caravanes de marchands arrivant à l’ancien caravansérail.
Car la place du Registan n’a pas toujours été comme on la voit aujourd’hui. Les Émirs et Sultans ont reconstruits ce qui étaient détruits, ont fait des modifications etc… Aujourd’hui, la place est entourée de trois grandes madrassas. Pour visiter, il faut payer l’entrée qui coûte 4 euros.
Les madrassas du Registan
La plus ancienne est la madrassa Ulugh Bek, finalisée en 1420. Ce Sultan, petit-fils de Tamerlan, était connu pour son amour pour la science. Il a énormément investi dans l’éducation et a même enseigné l’astronomie.
L’intérieur est joli aussi et c’est la seule où on peut monter aux étages.
La madrassa Sherdor date de 1635, plus récente. Elle a été fabriquée juste en face de la madrassa Ulugh Bek. Les deux minarets et les deux dômes bleues de chaque côté font d’elle la plus réussie des trois selon moi.
Par contre, l’intérieur n’est pas le plus intéressant à visiter. L’habit ne fait pas le moine, ou bien le minaret ne fait pas la madrassa plutôt.
Enfin, la dernière madrassa est la Tilla Kari, finalisée en 1960. Tilla Kari me fait plus penser à de la cuisine indienne qu’à un nom de madrassa mais passons, c’est pas important !
La cour intérieure est magnifique. Comme dans les villes précédentes d’Ouzbékistan, je privilégie les visites matinales pour éviter d’être avec les tours organisés qui arrivent tous vers 10h-10h30. Découvrir ce genre de lieux historiques nécessite du silence !
La coupole sous le dôme de la madrassa Tilla Kari est splendide.
Quand les groupes arrivent, cela signifie qu’il est l’heure de partir pour moi. Mais j’ai pu bien profiter, je suis même resté 2 heures !
Je me pose ensuite dans un parc à proximité. Un jeune de 16 ans vient me voir et veut juste me parler pour pratiquer son anglais. On discute 15 minutes, sous l’œil de sa mère qui me demande en russe à la fin si son fils parle correctement anglais pour confirmer qu’il écoute bien en cours !
La mosquée Bibi Khanym
Le lendemain matin, j’ai visité la partie nord de la ville. J’étais accompagné d’un russe, Daniel, rencontré à l’auberge (j’ai quand même vachement perdu au change : accompagné d’une belle latine brune les jours précédents, et maintenant avec un russe chauve). Daniel fait partie de ces milliers de russes qui ont fuit leurs pays pour éviter la mobilisation.
J’en ai rencontré une centaine depuis le début de mon voyage. J’ai vraiment de la peine pour eux : ils errent de pays en pays à la recherche d’un endroit où se poser. Daniel travaille à distance et gagne plutôt bien sa vie, mais socialement c’est compliqué d’être loin de ses proches. D’ailleurs, il prend le risque de rentrer à Moscou dans quelques jours, sa famille lui manque terriblement. Tous les Russes que je rencontre sont attachants, ce peuple a l’air incroyable. Comme pour l’Iran, il ne faut pas confondre Peuple et Gouvernement et faire des jugements trop hâtifs (ce qu’on fait en occident en diabolisant les russes).
Bref, tout ça pour dire que j’ai visité la mosquée Bibi-Khanym, l’une des plus imposantes que j’ai vu : 167 mètres de long pour 109 mètres de large.
La route devant la mosquée est en chantier. De nombreux ouvriers posent à la main pavé après pavé. Quatre d’entre eux m’ont demandé de les prendre en photo lorsqu’ils m’ont vu m’appliquer à cadrer la mosquée. Pourquoi ? Je n’en sais toujours rien. Ils ne voulaient même pas que je leur envoi la photo ensuite. Ils m’ont peut-être reconnu : « oh, le célèbre voyageur français, Yakarever ». Oui, ça doit être ça.
Un pont piéton plus loin permet d’enjamber l’une des artères principales de la ville, où la circulation est intense.
Mosquée Hazrat Khizr
Juste après ce pont se trouve la mosquée Hazrat Khizr, plus discrète que les autres.
Cette mosquée a la particularité d’accueillir le mausolée d’Islam Karimov, président de l’Ouzbékistan de 1990 à 2016. Un grand démocrate, élu avec plus de 90 % des suffrages à chaque fois (!).
Nécropole Shohi-Zinda
On poursuit notre visite du secteur en se rendant à la Nécropole Shohi-Zinda. Ce site est l’un des plus connus de Samarcande et mérite un détour. Il s’agit d’un ensemble de mausolées et de mosquées datant principalement du 14ème et 15ème siècle (mais les plus anciens ont 1 000 ans !). Des femmes de Tamerlan y sont enterrées notamment.
Un des mausolées est particulièrement sacré et de nombreux visiteurs y viennent prier puisqu’il s’agit de Koussam Ibn Abbas, cousin de Mahomet.
De grands cimetières se trouvent à proximité de la Nécropole, tout le monde souhaitant être enterré au plus près de ces célébrités. On trouve même un cimetière juif.
Pour mieux comprendre cette histoire et la fondation de Samarcande, on s’est rendu au musée Afrosyab. Bon, comme je le craignais, très peu d’explications et beaucoup de poteries, de bijoux… J’aurais dû m’en abstenir et me renseigner sur wikipedia, comme je le fais d’habitude !
Deux semaines en Ouzbékistan et pis s’en va !
J’ai passé cinq nuits à Samarcande, ce qui est beaucoup pour quelqu’un comme moi qui n’est pas trop fan des grandes villes en général. Mais Samarcande fait définitivement partie de ces villes mythiques ; au même titre qu’Ispahan en Iran, même si cette dernière reste la plus belle ville que j’ai vu de ma vie je pense !
J’ai passé du bon temps ici entre les visites, du repos, les bouffes entre amis (j’ai revu de nombreux voyageurs rencontrés à Khiva et Boukhara)…
Bref, après quelques informations complémentaires envoyées, j’ai fini par recevoir mon e-visa pour le Tadjikistan ! J’ai tellement hâte d’aller découvrir ce pays avec les mythiques montagnes du Pamir que je ne reste pas plus longtemps en Ouzbékistan. Je fais le trajet le samedi 24 juin vers la capitale, Douchanbé, accompagné d’un autrichien avec qui je vais voyager les prochaines semaines !
A vrai dire, je n’ai pas eu un coup de cœur pour l’Ouzbékistan. Toutes les villes que j’ai visité sont très jolies mais c’est assez répétitif en terme de visite et d’architecture. De plus, ça manque de nature : du désert, du désert, et tiens, encore du désert ! Il y a bien des montagnes tout à l’ouest du pays mais elles sont loin et elles seront plus impressionnantes au Tadjikistan et Kirghizistan. Enfin, visiter en cette période de l’année rend tout déplacement assez inconfortable avec la chaleur. Ça m’a pas mal démotivé à aller explorer des endroits plus reculés malheureusement. Le mois de mai doit mieux s’y prêter. Tant pis !
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Douchanbé, la capitale du Tadjikistan - Y a qu'à rêver · 26 juin 2023 à 14h03
[…] de découvrir Douchanbé, il a d’abord fallu faire le trajet depuis Samarcande, en Ouzbékistan. J’étais accompagné de Danijel, un autrichien avec qui je vais louer un […]