« Tous nos actes sont un cri de guerre poussé à la face de l’impérialisme. Où que la mort nous surprenne, elle sera bien accueillie si notre cri de guerre trouve une oreille attentive, qu’une autre main que la notre se tend pour empoigner nos armes. »

Ernesto Che Guevara

C’est ici, dans l’est de la Bolivie, qu’Ernesto « Che » Guevara est mort le 9 octobre 1967. Après mon voyage à Cuba où je me suis passionné pour l’Histoire révolutionnaire de l’île et notamment à Guevara, il m’était impensable de venir en Bolivie sans faire cette « ruta del Che ».

Voir l’article sur Santa Clara (Cuba).

Pourquoi en Bolivie ?

Après le succès de la révolution cubaine, le Che s’est vu confier des postes importants par Fidel Castro : directeur de la Banque Centrale, Ministre de l’Industrie… Mais après quelques années, il décide de poursuivre la révolution dans d’autres pays, victimes de dictateurs et de l’impérialisme US. C’est ainsi qu’il combattra au Congo, pays d’un autre grand révolutionnaire (Patrice Lumumba), puis ensuite en Bolivie. Il arrivera dans ce pays en totale clandestinité, avec une tête méconnaissable et un passeport uruguayen.

« Créer deux, trois… de nombreux Vietnam, telle est la consigne ».

L’objectif de Guevara (d’après ces propres mots)

47 guérilleros, dont 16 cubains, forment le groupe. Cependant, le mouvement de guérilla ne prend pas en Bolivie, peu de paysans rejoignant la lutte armée.

Les USA entrent en scène

L’armée bolivienne, aidée par la CIA, apprend la présence du Che parmi les guérilleros suite à la torture de certains qui ont été capturés. Les USA prennent alors un rôle majeur dans les recherches de Guevara. Les forces spéciales sont envoyées en Bolivie pour épauler l’armée du dictateur bolivien.

Place au voyage !

C’est donc dans ces contrées perdues de la Bolivie qu’a prit fin la vie du Che. Voilà pour la partie « Histoire ». Maintenant la partie « voyage » :

Pour se rendre aux différents endroits symboliques, deux options :

– soit par agence, mais ça coûte une fortune !

– soit la démerde ! Solution que j’ai choisi bien sûr…

Peu de voyageurs font cette route du Che. A vrai dire, en 6 mois de voyage, je n’ai rencontré personne l’ayant fait… Car ça a l’air tellement la galère de se rendre dans ces endroits par ses propres moyens que tout le monde doit se décourager. Mais je suis bien motivé à y aller, peu importe la difficulté !

Toujours y aller à l’audace !

Je pars donc seul de Samaipata le lundi matin. Un taxi collectif direction Mairana, à seulement 20 km. Puis un truffi (nom bolivien pour dire minibus) direction Vallegrande, à 2-3 heures de route. C’est dans l’hôpital de cette petite ville que le corps du Che fût exposé.

Je me trouve un hôtel en arrivant puis vais à la Casa de la Cultura pour obtenir des informations. Pour aller à La Higuera (le village où il s’est fait capturé et tué), ce n’est pas évident, comme prévu. Seule solution fiable : prendre un taxi privé depuis Vallegrande, mais ça coûte assez cher.

Je ressors de la Casa de la Cultura en réfléchissant à un moyen plus économique… En vain. Dix minutes après, je vois deux mecs qui vont à la Casa. Ce sont deux mexicains et ils comptent faire cette route du Che également. De ce fait, on va pouvoir partager les frais de taxi. Quand la chance me sourit !

Sauf qu’ils veulent dormir ce soir à La Higuera. Du coup, je retourne à mon hôtel où j’aurai laissé mon sac une demi-heure au final. La proprio ne me fait rien payer ; gentil de sa part. Le mec de la Casa de la Cultura nous met en relation avec un taxi travaillant à Vallegrande mais habitant à La Higuera.

En route vers La Higuera

C’est parti pour 2h30 de trajet sur des routes défoncées, avec de minuscules villages perdus dans la vallée. C’est sûr, c’est la Bolivie profonde ici ! En route, on s’arrête 2-3 fois regonfler les roues de la voiture avec…une pompe à vélo ! Pas très efficace mais ça dépanne.

Notre taxi et guide à la fois, Santos, avait 6 ans à l’époque et a donc vu les guérilleros et le Che de ses propres yeux. Incroyable ! Il connaît par cœur tous les noms, les nationalités, les rôles… Mais il n’a en revanche jamais entendu parler de Barack Obama ou de George W Bush !

Le lieu de la capture

On arrive en fin d’après-midi près de La Higuera. On entame une petite marche de 2h30 aller-retour pour aller à la Quebrada del Churo, lieu où le Che et les guérilleros se sont fait capturer, ou tuer. Santos connaît toute l’histoire et le déroulement. On l’écoute attentivement, ne perdant pas une miette.

Certains ont pu s’échapper, et atteindre le Chili où ils ont été aidés par un autre grand Monsieur de l’Histoire de ce continent : Salvador Allende.

Ça fait bizarre d’être ici, de s’imaginer les guérilleros épuisés, blessés, affamés, et se faire surprendre par l’armée. De se dire qu’ici, il y a eu des échanges de tirs et que certains hommes ont trouvé la mort…

Bolivie Ruta del Che Quebrada del Churo

On va ensuite chez Santos, où il garde son trésor : il a récupéré à la suite des combats la ceinture d’un guérillero avec encore les balles et l’arme. Ça a une valeur énorme pour lui ; il ne vendrait ces objets pour rien au monde.

Soirée avec des médecins cubains

Le Che s’est fait capturer après avoir été blessé à la jambe. Il a été emprisonné une nuit à l’école de La Higuera. On se rend donc dans ce village de 60 habitants. On a dormi dans la nouvelle école, où il y a un petit dortoir pour 2 euros la nuit. A côté de notre dortoir, deux médecins cubains étaient là. Peu de monde le sait mais la médecine cubaine est l’une des plus avancées au monde, et l’État Cubain a envoyé des médecins dans de nombreux pays pauvres de la planète, dont la Bolivie. Ils donnent des soins gratuitement aux gens qui n’ont rien et forment de futurs médecins boliviens. Chapeau bas !

Bolivie Ruta del Che La Higuera

On a passé la soirée avec ces médecins, très intéressants, après avoir mangé chez une famille (pas de restaurant à part un bar tenu par un français (!) aux tarifs assez élevés). Les gens vivent de rien ici, très pauvrement, mais ont été tellement gentils avec nous…

L’ancienne école

Le lendemain matin, on se lève assez tôt pour visiter l’ancienne école où le Che a été emprisonné. C’est aujourd’hui un petit musée.

Bolivie Ruta del Che La Higuera
Bolivie Ruta del Che La Higuera

Il y a encore la chaise et la porte de l’époque. De petits messages recouvrent les espaces vides des murs. Messages d’hommages au Che, ou messages d’espoirs, de révolution…

Bolivie Ruta del Che La Higuera

C’est ici que le Che a passé sa dernière nuit et s’est fait ensuite fusiller le matin. Vraiment émouvant d’être là…

A la gloire du Che

Dans ce minuscule village, sur la place principale, il y a un buste de Guevara.

Bolivie Ruta del Che La Higuera

Ainsi que des messages révolutionnaires ou des phrases célèbres du guérillero partout sur les murs :

Vallegrande

En fin de matinée, on retourne à Vallegrande. On va directement aux « lavoirs » : le cadavre du Che a été transporté en hélicoptère jusqu’à Vallegrande et a été exposé à l’hôpital, dans la pièce où à l’époque on lavait le linge. C’est ici qu’a été prise la tristement célèbre photo du Che mort :

Che Guevara mort Vallegrande

Là aussi, des messages recouvrent tous les murs.

Ses mains ont été coupées et envoyées au dictateur pour prouver sa mort.

Il s’est fait ensuite enterrer près du village, en tout secret. C’est seulement dans les années 90 qu’un ancien militaire a parlé. On a pu retrouver le lieu où Guevara et 6 autres guérilleros ont été enterrés. Un mausolée a été construit à cet endroit.

Bolivie Ruta del Che Vallegrande
Bolivie Ruta del Che Vallegrande

Les restes du Che ont été renvoyés à Cuba, où vit sa famille. Un mausolée immense a été construit à Santa Clara, à côté d’un cimetière où reposent de nombreux guérilleros. Une flamme a été allumée en 1997 par Fidel Castro ; la flamme révolutionnaire, qui ne s’éteindra jamais…

Bolivie Ruta del Che Vallegrande

Je retourne à Samaipata en fin d’après-midi.

J’ai donc réussi à faire cette route du Che sans problème, en seulement deux jours grâce à la rencontre de ces deux mexicains, Carlos et Alejandro (qui sont très sympas au passage !).

C’était très émouvant de visiter ces endroits reculés et pourtant historiques. La rencontre de Santos a rendu les visites encore mieux, comme si on vivait les scènes de l’époque avec ses récits.

Ernesto Guevara fait partie de ces Hommes qui inspirent des générations entières, même quasiment 50 ans après sa mort… Il a défendu ses idéaux jusqu’à la mort, comme les autres guérilleros tombés à ses cotés en martyr.

On peut tuer un révolutionnaire mais pas la révolution !

4 commentaires

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