« N’ayez jamais peur de la vie, n’ayez jamais peur de l’aventure, faites confiance au hasard, à la chance, à la destinée. Partez, allez conquérir d’autres espaces, d’autres espérances. Le reste vous sera donné de surcroît. »

Henry de Monfreid

Depuis l’ascension du volcan Cotopaxi (5 900 mètres) en Équateur, je rêve du Huayna Potosi... En langue Aymara, Huayna Potosi signifie « jeune colline ». Mais à 6 088 mètres d’altitude, c’est tout sauf une simple colline !

Cela dit, il est considéré comme l’un des 6 000 les plus « accessibles » au monde. Après quelques jours à plus de 3 500 mètres pour être bien acclimaté, j’ai décidé de me lancer dans cette aventure hors norme !

Je suis parti avec l’agence qui a le nom le plus original : Huayna Potosi Travel Agency. Évidemment, pour ce genre d’activité, impossible de s’y aventurer seul sans guide et sans équipement adapté.

Bolivie Ascension Huayna Potosi

Faut se lancer !

Le premier jour, rendez-vous à 9 heures au bureau de l’agence. On est un groupe de 12 : 5 boliviens, 6 anglophones et moi-même. L’agence nous fournit tous les équipements : crampons et chaussures d’alpinisme, piolets, casques, harnais…

On quitte La Paz en milieu de matinée à bord d’un minibus pas très performant (on a même dû descendre lors d’une montée pour faire moins de poids et qu’il puisse avancer !).

On arrive au premier refuge à 4 750 mètres vers 13h30. Pour indication, le Mont Blanc culmine à 4 800 mètres. Du coup, c’est comme si on avait atteint le sommet du Mont Blanc en minibus…

Bolivie Ascension Huayna Potosi

Les guides Boliviens ne parlent pas anglais, et les anglophones du groupe ne parlent évidemment pas espagnol… On me charge donc de faire traducteur pendant ces 3 jours ! J’aurais dû négocier un tarif spécial si j’avais su.

Entraînement

L’après-midi, on se rend à un glacier à 1 heure de marche du refuge. Là, on s’entraîne avec les crampons et piolets. Nous ne sommes que deux dans le groupe à avoir déjà fait ça, mais c’est quand même utile pour se remémorer la technique.

On essaye d’escalader une paroi. C’est impressionnant ce qu’on peut franchir avec juste des crampons et des piolets !

Bolivie Ascension Huayna Potosi

On retourne ensuite au refuge où l’on dîne. La salle commune est géniale, assez grande et avec une cheminée pour réchauffer l’endroit. Par contre, il fait froid dans les dortoirs et mon sac de couchage est un peu juste pour cette température.

Le second matin, pas grand chose à signaler à part un excellent petit-déj’ de servi (sans doute le meilleur depuis que j’ai quitté Cuba).

Bolivie Ascension Huayna Potosi

La montée commence !

A 11h30, on déjeune léger avant de commencer la montée vers le second refuge à 5 350 mètres. Il n’y a pas trop de neige sur cette partie et on peut y aller avec nos chaussures de randonnées aux pieds. Mais avec un sac de 15 kg sur le dos (toutes les affaires d’alpinisme dedans), ce n’est pas non plus une partie de plaisir !

Bolivie Ascension Huayna Potosi
Bolivie Ascension Huayna Potosi

On y parvient 3 heures plus tard. Le second refuge est plus rudimentaire : juste des sortes de tentes, mais assez bien isolées du froid. L’agence par laquelle je suis passé a ses propres refuges. Le second est 150 mètres plus haut que le refuge commun. Ça ne paraît pas grand chose de gagné, mais en réalité c’est énorme à cette altitude.

Bolivie Ascension Huayna Potosi

Prévenir le mal des montagnes

Dans le groupe, plusieurs personnes ressentent déjà les effets de l’altitude : mal de tête, grande fatigue… Esteban (Este-bandido comme dit le guide), un américain, se sent bien. Comme durant l’ascension finale, on n’est que deux avec un guide (cordée de 3 personnes), je lui propose de la faire avec moi. En effet, je n’ai pas du tout envie de monter avec quelqu’un qui se sent mal et de ne pas atteindre le sommet.

A 17h30, on dîne très légèrement (juste un bol de pâtes). Avant de monter à une telle altitude, il ne faut pas beaucoup manger, et surtout pas de viande, afin d’éviter le mal des montagnes. Une heure plus tard, à 18h30, dodo ! On est serré les uns contre les autres pour ne pas avoir trop froid. Mais dur de dormir ; l’envie d’en découdre avec cette montagne est trop forte et je suis impatient de me lancer dans cette montée !

Un peu de temps pour se préparer…

On se lève à 1 heure du mat’ le dimanche. On boit un mate de coca et mange un bout de pain. Et on s’équipe pendant un bout de temps…

Sur moi, j’avais 2 t-shirts à manches longues (un technique pour le froid, un en laine de mérinos), un t-shirt en coton, ma polaire, une veste coupe-vent et imperméable, un sous-pantalon technique, un pantalon normal, un pantalon épais et imperméable, 2 paires de chaussettes chaudes, les grosses chaussures d’alpinisme, une écharpe qui couvre le coup et la bouche, un bonnet, deux paires de gants et la lampe frontale. Ouf, il en faut du temps pour mettre tout ça correctement !

A 2 heures, c’est parti ! Les conditions météo sont parfaites : pas de vent et ciel dégagé. Notre guide, Eduardo, a 58 ans et a gravi tous les hauts sommets de Bolivie, d’Argentine et du Chili. J’espère que j’aurai la même condition physique que lui à son âge.

Bolivie Ascension Huayna Potosi

Une ascension rondement menée !

Après 1h30 de marche, on atteint un mur de glace à franchir. Heureusement, il a été un peu aménagé pour faciliter l’escalade. On a un bon rythme : on marche lentement en continu, en faisant des courtes pauses régulièrement pour s’hydrater, manger du chocolat (bon pour l’altitude) et mastiquer quelques feuilles de coca. De toute façon, on ne peut pas s’arrêter trop longtemps, car il fait trop froid et on serait frigorifié rapidement.

On aperçoit déjà les lumières de La Paz tout en bas tellement on est haut. Ça motive à continuer !

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Un dernier énorme effort

La dernière heure et demie est la plus dure. Ça monte fort : une pente de 80 degrés ! Il n’y a aucun endroit adapté pour s’arrêter et souffler. Parfois, de chaque côté de la voie, ce sont des immenses pentes abruptes. Pas le droit au faux pas ou une chute vertigineuse nous attend !

Esteban souffre beaucoup. Il est épuisé et a un mal fou à respirer. Pour ma part, comme durant l’ascension du Cotopaxi, ça va plutôt bien à part mal aux jambes (mais ça, c’est inévitable). Je n’ai aucun problème dû à l’altitude, et respire bien.

Mais j’ai un secret : avant de commencer l’ascension, j’ai pris une dose de ventoline (médicament contre l’asthme qui augmente la capacité pulmonaire). Je ne sais pas si c’est ça qui m’a aidé, mais j’ai respiré presque normalement tout le long de l’ascension.

Bolivie Ascension Huayna Potosi

Le graal

On arrive finalement au sommet après 4h30 d’efforts, à 6 088 mètres ! C’est grandiose d’assister au lever du soleil ici, aucun mot pour décrire ce qu’on peut ressentir… On voit La Paz, la Cordillère Royale où plusieurs sommets à plus de 5 000 dépassent de la mer de nuages, le Lac Titicaca… Juste magnifique et inoubliable.

Cette impression de dominer le monde récompense toutes ces souffrances. Moment insolite : on voit un avion passé au loin et on est plus haut que lui !

Deux boliviens de notre groupe étaient déjà au sommet lorsqu’on est arrivé. L’un a bien souffert aussi à cause de problèmes d’estomac : à haute altitude, l’estomac ne fonctionne pas bien et il peut arriver d’avoir des problèmes de digestion. Pas pratique pour une ascension !

Bolivie Ascension Huayna Potosi

Le sommet du Huayna n’est pas très grand, juste de quoi être 8 personnes. Du coup, on ne peut pas s’éterniser en haut car il faut laisser la place aux autres qui arrivent. Mais il y fait tellement froid (entre – 20 et – 30 degrés !) qu’on ne peut pas rester une heure de toute façon. On y est resté 20 minutes avant d’entamer la descente.

Bolivie Ascension Huayna Potosi

La descente

Comme pour le Cotopaxi, c’est impressionnant de voir les pentes qu’on a montées. Esteban est un peu effrayé d’ailleurs de devoir descendre (sensation de vertige). Le guide le conseille et je traduis. Le descente se fait tranquillement, en prenant notre temps et en profitant de la vue splendide que l’on a.

Bolivie Ascension Huayna Potosi

On voit d’ailleurs l’Illimani (la grande montagne de la Cordillère Royale) et le Nevado Sajama, le point le plus haut de Bolivie à 6 542 mètres, pourtant à 300 km de là !

Bolivie Ascension Huayna Potosi Illimani
Bolivie Ascension Huayna Potosi Sajama

On atteint le second refuge deux heures plus tard. Les chaussures « normales » remplacent celles d’alpinisme. Elles paraissent toutes légères !

On continue encore jusqu’au premier refuge. Lorsqu’on y arrive, on mange (beaucoup, car j’avais une faim monstrueuse !) et se repose un peu.

Bolivie Ascension Huayna Potosi

Je l’ai fait !!!!!

Sur les 12 du groupe, on n’est que 6 à avoir atteint le sommet. 4 ont eu le mal des montagnes et ont été malades (vomissements, syndrome du bourré…), et les 2 autres sont allés au bout d’eux-mêmes et étaient au bord de l’évanouissement. Respect à eux !

On retourne à La Paz en milieu d’après-midi. Bonne douche chaude et une nuit de…13 heures pour récupérer !

Bolivie Ascension Huayna Potosi

Mais c’est fait ! J’ai franchi la barre des 6 000 mètres d’altitude en Bolivie ! Un vrai rêve que je pensais irréalisable il y a peu…

Il m’est impossible de décrire ce que je ressens après avoir fait et vu ça. Je peux juste dire que je fais sûrement partie des hommes les plus heureux au monde…


7 commentaires

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