De Douchanbé à Khorog avec un petit détour par la vallée de Bartang : voici la première partie de ma belle aventure dans les montagnes du Pamir au Tadjikistan !
L’organisation
Pour vivre cette aventure pleinement, je ne voulais pas de tours organisés. N’ayant plus ma belle moto restée en Géorgie, j’ai répondu à une annonce de trois voyageurs sur le forum Caravanistan (la bible des voyages en Asie Centrale). Ils recherchaient une quatrième personne pour louer un 4×4. Parfait !
On s’est tous retrouvé à Douchanbé deux jours avant le départ, fixé au 27 juin. Mes collègues de voyage pour les prochaines semaines : Lisa (française), Danijel (Autrichien), et Sage (USA).
Avant de partir dans les montagnes du Pamir, on a retiré suffisamment d’argent pour deux semaines. En effet, il n’y a quasiment pas de distributeurs, et si vous en trouvez il est probable qu’ils ne fonctionnent pas avec votre carte.
Le 27 au matin, on récupère notre 4×4, un Toyota 4Runner, sur le parking d’un centre commercial. On est passé par l’agence de location Roof of the World Travel. Il y a très peu de choix à Douchanbé et les prix ont tendance à s’envoler. On a ainsi payé 120 dollars par jour pour le 4×4, assurance comprise.
Auparavant, la plupart des voyageurs traversaient le Pamir en partant du Kirghizistan, où il y a plus d’offres de location et donc de meilleurs tarifs, et finissaient à Douchanbé. Mais depuis plus d’un an, les deux pays sont en conflit et il n’est plus possible de traverser la frontière. Les agences de location à Douchanbé ont donc le monopole et savent que les voyageurs n’ont d’autre choix que de passer par elles !
Bref, l’importance est qu’on a notre voiture prête à prendre les pistes du Pamir !
La carte
Pour faciliter la compréhension de notre trajet, et parce que cette région du monde est loin d’être la plus connue, une petite carte ne fait pas de mal !
Cet article concerne notre trajet de Douchanbé à Khorog en passant par la route nord (route de Tavildara).
Jour 1 : Douchanbé – Qalaikhumb
On quitte la capitale à 9h le matin. Peu de circulation donc facile de conduire. On a choisi de passer par la route nord, plus courte en kilomètres et plus belle mais en très mauvais état. Elle était impraticable il y a tout juste un mois encore à cause d’éboulements.
On longe une rivière puissante, chargée en boue et sédiments. Pas une belle couleur bleue donc, plutôt un gris triste ! De plus, une tempête de sable dans les déserts de Chine obstruent le ciel et l’horizon. Les paysages doivent sûrement être impressionnants mais on ne voit pas très loin !
A peine deux heures qu’on a quitté la capitale et on trouve déjà des villages très isolés. La route, comme prévue, n’en est plus vraiment une. Ça secoue et il faut trouver la meilleure trajectoire pour éviter les trous.
A une pause à une petite épicerie, je revois par hasard un cycliste français, Iréné, rencontré à Khiva, en Ouzbékistan.
Le col de Khaburabot
Durant la montée vers le col de Khaburabot, je me suis trompé de piste. A vrai dire, je pensais qu’il n’y avait qu’un seul chemin donc j’ai suivi bêtement une autre voiture. Sauf que quand elle s’est garée dans un petit village et qu’on a vérifié où on était…bah on n’était plus du tout dans la bonne direction ! Au lieu de faire demi-tour, on a pris des pistes annexes pour retourner sur la route principale (qui est une piste un peu plus large en fait). On a ainsi découvert de charmants petits villages perdus dans la montagne.
On atteint finalement le col de Khaburabot à 3 252 mètres. Très belle vue sur les sommets enneigés et les vallées.
Trois hommes en voiture arrivent aussi. On discute dans un mélange de russe et de tadjik (Lisa connaît un peu la langue locale). Ils ont une chèvre vivante dans le coffre en prévision de l’Aïd qui est le lendemain.
La descente qui suit est magnifique et la piste un peu moins remuante. On arrive à Qalaikhumb à 18h30 après cette longue première journée (9h30 de route pour 282 km..!).
On dort à Sangakov Homestay. Partout dans le Pamir, le logement coûte 10 ou 15 dollars avec dîner et petit-déj inclus.
Lucas, le motard français rencontré à Istanbul et revu à Douchanbé, arrive peu après avec deux autres motards. L’un d’eux a cogné un chien à 60 km/h et a donc chuté. Quelques bobos sur le bonhomme et la moto mais rien de bloquant heureusement.
Jour 2 : Qalaikhumb – Jizev
210 km de prévu, ce qui est beaucoup vu l’état de la route à venir. On se lève à 5h30 du mat’ pour partir une heure plus tard. Il est trop tôt pour moi, mes yeux n’étant pas encore totalement ouverts, je laisse Danijel conduire.
A partir de Qalaikhumb, la route est en travaux. Les chinois s’en chargent, dans le cadre de leur méga projet des Nouvelles Routes de la Soie. Mais par chance, pas de chantier aujourd’hui car c’est jour férié au Tadjikistan et dans tous les pays musulmans (Aïd). On ne se retrouve donc pas bloqué plusieurs heures comme ça arrive à d’autres voyageurs à devoir attendre la pause déjeuner ou la fin de leurs journées de travail pour pouvoir passer. Mais ça n’empêche que la route est vraiment en très mauvais état avec de gros cailloux, des trous…
Après une heure sur cette piste, la roue avant gauche crève. On la change rapidement et on peut repartir une petite demi-heure plus tard.
L’Afghanistan
La piste longe la rivière. De l’autre côté : l’Afghanistan. Mon opérateur téléphonique me souhaite la bienvenue dans ce pays. Le lendemain, il m’enverra un message de bienvenue en Russie (autant je comprends pour l’Afghanistan car je ne suis qu’à 20 mètres, autant la Russie est très loin !). Bref, Orange est perdu dans ces contrées et ne sait pas du tout où je suis !
C’est difficile à croire qu’on longe l’Afghanistan, ce pays magnifique mais qui n’a plus connu la paix depuis des décennies. Vu d’ici, les villages ont l’air figé dans le temps et semblent très tranquilles. On aperçoit aussi une grande tente blanche d’aides humanitaires.
Le long de la route, on croise très souvent des militaires à pied, par groupe de trois. Le but étant sûrement de montrer une présence militaire et de dissuader les Talibans de faire quoi que ce soit. Mais ils font de la peine ces militaires à marcher le long d’une piste poussiéreuse en plein soleil. Ils nous demandent même parfois de l’eau ou des cigarettes. Ils n’ont rien du tout, même pas un sac à dos avec des provisions !
A 14h, on arrive à Rushan, un gros village où on peut faire le plein. On s’arrête aussi à la première guesthouse qu’on voit et on y laisse la plupart des nos affaires afin de s’alléger pour la suite de la journée.
La vallée de Bartang et Jizev
Peu après Rushan, on quitte la route principale pour aller dans la vallée de Bartang. Cette vallée va jusqu’au lac de Kakarul, près de la frontière Kirghize. Hélas, elle n’est pas praticable en 4×4 ; seuls les vélos et quelques motards motivés peuvent passer. Les rivières ont tendance à déborder, les ponts sont cassés à différents endroits… Bref, on se contente de rouler une vingtaine de kilomètres avant de garer la voiture.
On traverse la rivière sur un pont suspendu afin de se rendre dans la vallée de Jizev. Seule la force des jambes permet de s’y rendre !
On remonte la vallée durant 6 kilomètres. Ça fait du bien de marcher après toutes ces heures assis dans la voiture !
A 18h15, on arrive à un petit hameau au bord d’un lac. On dort à Lola Homestay. C’est très rustique mais j’aime beaucoup l’endroit. Petit tour du propriétaire :
La salle de bain était très bien équipée aussi, avec un beau miroir et un robinet dernier cri (pas d’eau courante donc faut pas gaspiller !). On avait plusieurs autres compagnons, dont un beau coq qui a accepté de poser en photo.
Les toilettes sèches sont à 30 mètres de la maison, comme dans de nombreux homestay du Pamir. Bref, ça pourrait rebuter des voyageurs de dormir ici mais moi j’aime beaucoup. Une expérience vraiment locale !
Le couple est très gentil et leur fille de 23 ans parle anglais.
Jour 3 : randonnée au lac Tsakinkul
Très bonne nuit passée à dormir sur des tapis. C’est tout simple mais confortable au final !
A 8h30, on part randonner plus loin dans la vallée.
Le soleil s’élève progressivement. On traverse deux autres petits hameaux, loin de tout. Les montagnes se reflètent dans les lacs qu’on longe.
Les gamins par ici sont ingénieux. Ils n’ont pas accès aux jouets et construisent donc eux-même ce dont ils ont besoin. Un radeau avec une plaque de tôle et des bouts de bois, ça suffit !
Après deux heures de marche, on atteint le lac Tsakinkul, au bout de la vallée. Une eau turquoise, entourée de montagnes enneigées. On y reste 30 minutes à admirer ce joli décor.
Puis on revient sur nos pas pour retourner jusqu’à la voiture, où on arrive à 14h. Une journée qui commence bien avec 16 kilomètres de marche !
Jizev – Khorog
On retourne à Rushan récupérer nos affaires laissées à la guesthouse. Puis on trouve un garage pour réparer notre pneu crevé de la veille. Il met le pneu dans une baignoire pour repérer le trou, et enfonce une résine avec un tournevis. Notre pneu est désormais apte à rouler, après 10 minutes de boulot et pour seulement 80 centimes d’euros ! Bon, je n’ai pas non plus hyper confiance alors ce pneu réparé sera notre roue de secours.
A 16h, on est prêt à quitter Rushan et faire la route vers Khorog. Seulement 65 km, à longer l’Afghanistan à nouveau.
Khorog est la porte d’entrée des montagnes du Pamir. Il y a de nombreux hôtels, des supermarchés, des restaurants… C’est le moment de faire le plein de provisions !
On loge à Welcome Inn, une très bonne adresse avec seulement 8 lits (deux dortoirs de 4). La proprio parle très bien anglais et est guide de montagne. Elle connaît par cœur la région et nous a conseillé sur plusieurs randos, lieux à voir…
Plus tard dans la soirée, j’ai rendez-vous avec Romain. On est originaire du même village, on a joué au foot dans le même club, des soirées ensemble quand on était plus jeune… Ça fait plusieurs années qu’on ne s’était pas vu et on se revoit là, dans les montagnes du Pamir ! On trouve un endroit où boire des bières pour parler voyage (il est parti de France en vélo il y a 13 mois) et des années écoulées !
Ces trois premiers jours ont déjà été magnifiques, notamment la vallée de Jizev qui est un vrai coup de cœur ! Hâte de découvrir la suite du Pamir !
4 commentaires
La vallée du Wakhan, entre Tadjikistan et Afghanistan - Y a qu'à rêver · 13 juillet 2023 à 12h51
[…] le précédent article, je commence par la carte […]
La Pamir Highway, route mythique du Tadjikistan - Y a qu'à rêver · 13 juillet 2023 à 14h50
[…] De Douchanbé à Khorog et Bartang […]
De Douchanbé à Khodjent, dans le nord du Tadjikistan - Y a qu'à rêver · 16 juillet 2023 à 9h57
[…] revient à Douchanbé le 11 dans l’après-midi après nos deux semaines magiques dans les montagnes du Pamir. Évidemment, on pose nos sacs au Green House Hostel, le QG des routards de la capitale. Je pensais […]
Le Pic Lénine en moto depuis Och - Y a qu'à rêver · 22 juillet 2023 à 6h09
[…] dans un camp de yourtes. Timon prend la même décision, et en plus on y retrouve Lisa, avec qui j’ai voyagé au Tadjikistan […]